[Cinéma] La Troisième Guerre, cette menace fantôme ?

La Troisième Guerre, réalisé par Giovanni Aloi, est un petit ovni dans le paysage cinématographique actuel: cast minimaliste, thématique peu abordée, et une atmosphère lourde de sens. Nous découvrons le quotidien de militaires français engagés dans l’opération Sentinelle, à savoir la protection des points sensibles du territoire. Il sort demain, 22 septembre en salles, et mérite d’aller découvrir son histoire.

Anthony Bajon qu’on a récemment vu dans Teddy, Karim Leklou (qu’on retrouve dans Bac Nord également), ainsi que Leila Bekhti tombent progressivement dans une des pires choses de la vie d’un soldat, l’attente. 
Est-ce que ces héros anonymes arriveront à tenir sous la pression ? A vous de le découvrir dans cette review !

Synopsis: 

“Léo vient juste de terminer ses classes et pour sa première affection, il écope d’une mission Sentinelle. Avec sa patrouille, il arpente les rues de la capitale à l’affût de la moindre menace. Mais plus la frustration augmente, plus la paranoïa guette le jeune soldat…”

Une désillusion profonde dans la vie d’un soldat

L’armée est une destination qui peut être séduisante, pour des jeunes comme Léo. Privés d’un vrai cadre familial, et avec un besoin d’appartenance, d’identité, de se savoir utile, il fonce. Et sort de ses classes pour…patrouiller dans les rues de Paris. Pas de départ en OPEX, pas de gloire à aller chercher à l’étranger, en tenue complète. C’est bien loin de ce qu’il attendait, et n’aide vraiment pas son quotidien.

On le verra dans différentes scènes, plus le film avance, et plus l’envie d’être acteur est forte, jusqu’à une action qui changera sa vie à jamais. Il arrive dans cette grande famille qu’est l’armée avec plein de grandes idées. Malheureusement pour lui, son entourage professionnel est bien plus pessimiste/terre-à-terre et la chute n’en est que plus brutale

Influençable, notre héros ? Clairement. Entre une mission Sentinelle qui le frustre, et les camarades qui se chambrent, Léo sombre progressivement dans une spirale toxique, et change de point de vue sur l’utilité de son boulot. Il passe de la fierté d’avoir intégré cette institution à une désillusion qui le poussera à aller trop loin, trop fort. 

Ce n’est certainement pas son sous-officier, Yasmine, qui a du mal à garder ses subordonnés dans le cadre, ou Hicham, avec sa vision très parano du monde (tout est une menace potentielle, tout le temps), qui vont aider Léo à aller dans le bon sens. Au final, Léo n’arrivera pas à obtenir cette sensation d’utilité envers lui-même et surtout, envers la Nation, grâce à ce cadre, bien au contraire. Léo se voit confronté à un laxisme, une lassitude, et une peur de l’extérieur, qu’il pense faire partie du boulot. C’est plus ses frères d’armes qui se laissent aller à des réactions peu professionnelles, mais étant une mentalité généralisée, est-ce qu’on peut leur en vouloir.

On retrouve la même façon de développer La Troisième Guerre que dans Jarhead. Une attente, qui devient progressivement un besoin obsessionnel tant il est désiré, et qui n’aboutit pas. Ils s’ennuient à tel point que se faire poignarder dans un accrochage serait presque une distraction bienvenue. C’est probablement la chose qui stresse le plus un soldat, cette fameuse attente. Elle se glisse dans le quotidien, fait voir des choses qui ne sont pas là, et surtout travaille l’imagination. Si ce n’est pas soulagé, la tête monte en pression, ce qu’on voit très bien dans le film. Progressivement, l’atmosphère s’épaissit, s’alourdit. Jusqu’à…Ce que vous verrez à la fin du film.

La Troisième Guerre, un film politique ?

Le réalisateur, Giovanni Aloi, a réussi à apporter un sous-contexte social assez subtil et intéressant à son film. En effet, il exprime un gap, une cassure entre les militaires, et les civils qu’ils protègent. Souvent, les militaires sont issus de milieux défavorisés, et quand vient le moment d’aller en mission Sentinelle, le contact avec la population qui n’a pas conscience de tout ce qui se trame, peut être assez tendu. 

L’arrivée dans une grande ville, particulièrement Paris, est assez particulière. Nous civils, nous n’y voyons qu’une ville. Les militaires eux peuvent y voir un lieu hostile, une zone de guerre potentielle. Ce décalage entre les deux visions n’aide pas non plus Léo à se sortir de son cadre pro pour respirer un peu. Au contraire, il s’enfonce de plus en plus dans son boulot, au point d’oublier qu’il peut s’en sortir également (la scène de retour chez ses parents est assez claire sur ça, ainsi que les interactions avec la nana du téléphone).

Conclusion

Un très bon premier long-métrage avec un trio d’acteurs cohérents, supportés par une réalisation de qualité, La Troisième Guerre est sobre, mais efficace. On a tendance à oublier, à force de les voir, que les forces armées continuent leur mission de sécurisation sur le sol français. Voir leur quotidien permet d’être un peu plus compréhensifs de leur engagement. Je recommande vivement ce petit voyage dans les bottes d’un soldat de l’Armée Française.

Comme le disait ce grand homme qu’était Cole dans King Kong: Skull Island “Parfois, un ennemi n’existe qu’à partir du moment où tu le cherches”. C’est ce qui se passe dans la tête de Léo, avec une fin inattendue. 

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