Fut un temps où je vous aurais dit que le cinéma de genre français était aussi rare que le monstre du Loch Ness. Ce n’était pas encore forcément faux, jusqu’à 2016 et l’incroyable « Grave » de Julia Decourneau. Heureusement pour tout le monde, ce genre reprend son envol doucement, et en 2021, entre « La Nuée » actuellement en salles, et Teddy qui arrive dès demain, il semblerait que les films de genre reviennent en force !
Réalisé par le duo des frères Ludovic et Zoran Boukherma, leur tout premier long-métrage tente de revisiter le mythe du loup-garou, d’une manière assez originale. Est-ce que Teddy arrivera à séduire ? C’est un grand oui, et on vous explique pourquoi dans la suite de l’article !
Synopsis:
« Dans les Pyrénées, un loup attise la colère des villageois. Teddy, 19 ans, sans diplôme, vit avec son oncle adoptif et travaille dans un salon de massage. Sa petite amie Rebecca passe bientôt son bac, promise à un avenir radieux. Pour eux, c’est un été ordinaire qui s’annonce. Mais un soir de pleine lune, Teddy est griffé par une bête inconnue. Les semaines qui suivent, il est pris de curieuses pulsions animales…«
Un vrai loup-garou made in France
Un peu intemporel, sans âge bien défini, Teddy vit une vie un peu nulle dans un coin incroyable de France, les Pyrénées. Entre une recherche d’emploi pas géniale, sa copine Rebecca, tout est un peu perdu dans le coin. Le lieu autant que les gens. Perdus dans la pampa, entre des champs, des pâturages et des forêts, les habitants du village où il vit subissent l’assaut depuis quelques jours d’une bête, qui détruit systématiquement tous les troupeaux de la zone, de manière assez sauvage. Quid d’un loup, d’un gros chien ? Personne ne le sait très bien.
Teddy, lui, n’a clairement pas peur (par bêtise ou par curiosité) et un soir, entend du bruit entre les arbres. Ni une ni deux il fonce avec un poteau dans les bois, et revient avec une belle morsure sur le dos. Croque-mitaine, chien sauvage, ou encore l’imagination de ce jeune marginal ? Personne ne se doute de ce qui va se passer. Notre anti héros lui entame une transformation qui va changer toute sa vie.
Quand Teddy apparaît pour la première fois à l’écran, on ne sent clairement pas une menace. Un peu loser (beaucoup même), clairement marginal, le t-shirt dragon digne des années 2000, il s’appellerait Kevin que ça n’étonnerait personne. Il se verrait bien propriétaire d’une maison avec pergola, et insulte copieusement tout ce qui bouge. Il se sait un peu différent, un peu à côté de la plaque, mais il aspire à mieux.
Malheureusement, Teddy le nounours sombre progressivement dans une spirale animale, suite à sa rencontre fortuite avec vous savez quoi. Il résistera tant bien que mal à l’appel de la chair, jusqu’à ce que sa foi en l’humanité ne cède. A partir de là, le film se revêt de touches cramoisies, à mesure que le loup prend le pas sur Teddy. Ce qui n’empêchera pas Anthony Bajon de lâcher punchline sur punchline, et d’être excellent dans ce rôle un peu en dualité.
Teddy convainc avec cette petite touche d’irrévérence
Ce que j’ai beaucoup aimé dans Teddy, c’est cette approche terre-à-terre de cette créature mythique: pas de gothique grandiloquent, place à une campagne du Sud de la France tout ce qu’il y a de plus pittoresque. De la forêt, des champs, des beaufs. Le film s’assume tel qu’il est, parfois totalement burlesque, parfois très sérieux, sans jamais basculer totalement dans l’un ou dans l’autre. Le rythme est à l’instar d’un été perdu dans un coin paumé, lent sur le moment, mais rapide une fois que les crédits de fin défilent.
Le film n’est jamai arrogant ou trop sérieux. Il reste contenu dans quelques environnements, ce qui lui permet de dégager cette impression de simplicité efficace. On se croirait dans le village, et c’est rafraîchissant. Le casting est très bien choisi, et instaure, dès les première scènes, une sorte de malaise léger, de part les personnages.
Excellente chose à signaler, l’adolescence et la découverte de la sexualité ne sont pas mêlés à cette histoire, ce qui permet de dégager une marge de manoeuvre pour développer les changements qui arrivent à Teddy. L’évolution du personnage est plus portée sur sa vision de la vie idéale, qui est un rêve, et les réalités de la vraie vie qui peuvent faire mal. Un peu trop même.
Entre Teddy le marginal, le très curieux Pépin, les tocards de classe moyenne plus ou encore la gérante du salon de massage local, tout est fait pour vous mettre dans cette ambiance un peu crasse. Personne ne cherche trop à comprendre ce qui se passe avec les troupeaux décimés, la gendarmerie locale est très poussive. Seul Teddy semble s’y intéresser vraiment. Et quand il se fait mordre, tout change pour lui, mais personne, encore une fois ne s’en rend compte. Personne sauf Pépin, sublimement joué par Ludovic Torrent. Etiqueté comme idiot du village, personne ne fait vraiment attention à lui, et c’est bien dommage, car ça sera la seule personne à comprendre que Teddy sombre vers quelque chose de très mauvais.
Le film s’accroche aux codes du body horror typique de ce genre-là, et prend le parti de ne jamais vraiment dévoiler la créature, ce qui est assez rare (je ne m’attendais pas à un Dog Soldiers, ou un Wolfman). Ce qui rend ses quelques apparitions bien plus impactantes.
On retrouve un peu de cette ambiance que le film Grave avait apporté: peu de violence à l’écran, mais une sensation nauséeuse qui peine à partir. Comme une odeur de viande faisandée. Teddy pourrait bien en être la version masculine de ce genre.
Conclusion
Teddy revisite de manière intelligente et moderne le film de loup-garou, irrévérencieux, très humain et subtil comme il faut. Porté par des acteurs convaincus par le projet, et une mise en scène efficace, il permettra aux fans du genre de retrouver, mais aussi de découvrir ce que c’est de passer un été dans les Pyrénées quand le loup y est.
Excellente surprise, pas arrogante pour un sou, c’est avec un grand plaisir que je vous recommande d’aller voir le film, qui sort en salle mercredi 30 juin !