Test : Leica Q

Préambule

Leica. Pour la plupart des photographes du 21e siècle, ce nom est synonyme de matériel hors de prix réservé à une clientèle fortunée. Alors oui, c’est vrai, un Leica ce n’est pas donné. Et ne parlons pas des objectifs. Mais coupons court quant aux commentaires relatifs aux tarifs proposées par la marque à la petite pastille rouge : la qualité, ça se paie. Une Clio coûte bien moins cher qu’une Porsche et pourtant toutes les deux ont quatre roues, un moteur, un volant… La différence entre les deux ? Le plaisir, la longévité (et le prix, donc). 70% des Porsche dites “classic” (les vieilles Porsche quoi, des années 60, 70, 80…) circulent encore aujourd’hui. Pas sûr que 70% des Clio I de 1990 roulent encore de nos jours. Et ce n’est pas le même kiff. Ma belle analogie s’applique à Leica : c’est increvable. Les objectifs qui étaient déjà vieux alors qu’on n’était pas encore né sont aujourd’hui toujours en très bon état, idem pour des boîtiers M. Et à utiliser c’est kiffant. Tout cela a un prix.

J’ai commencé à shooter au Leica avec un M8. Le truc hyper obsolète, dépassé limite le jour de sa sortie (en 2006), mais avec la Leica Touch au niveau des images produites. Difficile de monter au-dessus de 640 ISO (et là on est déjà trop haut, ça bruite de partout), impossible de voir le rendu sur l’écran minuscule… Mais diantre, quel rendu !
Donc le M8, c’était pour la photo kiff. Le trip de faire de la photo. Le truc peut-être un peu snob, quoi. A côté de cela, pour la photo pro c’était Nikon, puis vint Sony. Et pour la photo de tous les jours, Fuji.  Mais aussi et mon smartphone (qu’il soit Apple, Samsung ou HTC) !

Je suis passé au full frame numérique avec le Nikon D700. Oh-My-God. Une tuerie à l’époque, et encore aujourd’hui. Après des reflex plein format toujours plus gros, je suis tombé sous le charme des Micro 4/3. Minuscules, et plein de promesse. Puis Sony a sorti ses A7 et aussi un compact qui m’a fait pleurer de bonheur : le RX1 (et son pote le RX1R, celui sans filtre passe-bas). Un compact avec focale fixe et un capteur full frame. L’hallu. Une qualité photo incroyable, dans le creux de la main. Pas parfaite la bête, mais un truc de dingue. Le tout pour 3,000€ (pour le RX1, moins cher que le RX1R) en 2012-2013. Ah oui. D’accord. 3,000 balles le compact. Mais n’oublions pas : la qualité, ça se paie. Il était bien moins cher au Japon mais ça c’est une autre histoire.

Sony, Leica, deux philosophies différentes, des prix bien différents aussi. Récemment, Leica s’est mis à nous sortir des appareils différents. Le Leica T en 2014 sonna l’heure de la révolution chez la marque allemande. Mais le petit T, bien que moins cher que ses illustres grands frères M, avait du mal face à la concurrence. Leica semblait se concentrer sur le M (M8, M9, M, M Monochrom…). Puis vint le Leica Q. Et là, ils ont mis tout le petit monde de la photo d’accord.

Oui oui, je sais, mon intro fut longue. Mais elle vous permet de comprendre par quoi je suis passé (et encore, je vous épargne mon coup de foudre pour le Nikon F401, il y a 25 ans environ…) avant d’arriver au Leica Q. Pendant longtemps je me suis dit “vas-y, prends un RX1R, t’auras plus jamais besoin d’acheter un APN après”. Mais difficile de mettre 3,000€ dans un compact, surtout après avoir vendu tout mon matos Nikon pour me jeter dans les bras de Sony du côté du A7 et des objectifs Zeiss. Puis j’ai eu la chance et le privilège de pouvoir passer du temps avec le Leica Q. Et qu’on soit photographe amateur, averti ou pro, la simplicité d’utilisation du Leica Q et la qualité de ses clichés ne laissent pas de marbre, bien au contraire. L’appareil est in-cro-yable. Allez, je vous livre quelques specs et on se concentre sur ce qui fait vraiment sa différence. Et qui justifie son prix de 3,990€.

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Le Leica Q

Capteur CMOS full frame de 24 Mpx
Objectif 28mm f/1.7
Viseur électronique
Stabilisé
100 – 50 000 ISO
Filme en Full HD à 60i/seconde
Ecran tactile

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Qu’est-ce qu’il est beau. Ok c’est subjectif. C’est juste un appareil photo noir. Mais il claque quand même, tout sobre qu’il est.
On l’allume, on colle son oeil au viseur électronique et paf ! La première baffe ! Un viseur incroyable de clarté, très lumineux.
On appuie pour faire la mise au point et paf ! Deuxième baffe ! L’autofocus est hyper rapide. C’est simple : il est plus rapide que la plupart des appareils photos “trèèèès rapides” du marché (Sony A6000, Olympus E-M1…). Wow. Pour une boîte qui fait du rangefinder et du compact sympa mais pas très nerveux, c’est assez surprenant.
On prend quelques photos, on transfère le tout sur son ordi, on lance son logiciel photo préféré (team Lightroom, big up) et paf ! Troisième baffe ! On est bien avec un Leica entre les mains. Un rendu à la Leica avec le pop de l’effet 3D (un Leica ça s’utilise à pleine ouverture, c’est net aussi bien au centre que sur les côtés), une plage dynamique immense permettant de rattraper un max de détails dans les noirs, des tons chair réalistes…

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Le Summilux 28mm f/1,7 pourrait paraître trop grand angle pour certains. Personnellement, je fais parti de ceux qui préfèrent le 28mm (team Elmarit 28mm f/2,8 big up). Mais Leica a pensé à ceux qui voudraient un cadrage plus serré : une pression sur le petit bouton placé juste à côté du “repose-pouce” et on fait apparaître dans le viseur (ou sur l’écran si on shoote via ce dernier) les lignes correspondant à un cadrage 35mm. Une autre pression sur ce même bouton et on fait apparaître les lignes d’un cadrage 50mm. Il ne s’agit pas d’un zoom numérique mais bien d’un recadrage, l’image sera alors plus petite (on passera de 24 Mpx à 15 Mpx pour le 35mm, puis à 8 Mpx pour le 50mm). Sachant que le Leica Q enregistrera tout de même la full version en 24 Mpx cadré au 28mm. Excellent non ?

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L’appareil se veut vraiment simple d’utilisation. On est très loin de la multitude de boutons que l’on trouve chez les amis nippons, tout est fait pour que l’utilisateur se concentre sur la prise de vue : on choisit son ouverture directement sur l’objectif, la vitesse sur le haut de l’appareil, les ISO, et c’est parti. Pour ma part c’est simple : priorité ouverture. Pour se faire, je mets f/1,7 sur l’objo, je mets la molette vitesse sur A et je mets les ISO en auto. Et c’est parti ! Au préalable j’aurais signifié au Leica Q de ne pas monter au-dessus de 3200 ISO (on peut monter jusqu’à 12500ISO sans trop de soucis) et de ne pas descendre en-dessous de 1/60 de seconde. Des réglages sommes toutes très basiques, mais qui me permettent de prendre le petit Leica avec moi et de juste “allumer, viser, déclencher”. L’esprit Leica, avec un autofocus de compèt’ en prime. On peut bien entendu faire la mise au point manuellement, ce qui sera aisé grâce au focus peaking couplé à un mode loupe.

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Lorsqu’on veut shooter macro, on tourne une bague à la base de l’objectif lui permettant de passer en mode Macro. Très astucieux, avec des résultats bluffants surtout quand on sait qu’habituellement la mise au point mini sur un Leica M est de 70cm… Là on peut être à moins de 20cm de son sujet.

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Un petit crop de la photo du dessus...
Un petit crop de la photo du dessus…

La batterie nous permet de prendre 400-500 photos avant de rendre l’âme, là où la concurrence direct se sent mal au bout de 200 clichés…

Voilà. Le Leica Q est pour moi le meilleur appareil photo de l’année pour qui cherche un APN “de tous les jours” permettant d’obtenir des photos d’une qualité exceptionnelle avec la Leica touch.

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6 comments
  1. Bonjour,

    Je prends connaissance de votre article assez tardivement mais je me permets tout de même ce commentaire si vous le permettez.
    Oui, le Q est un très bel objet.
    Il fait de très belles photos.
    Et je comprends que l’on puisse tomber amoureux de ce boitier.
    Pour autant, j’émettrais quelques réserves par rapport à votre article.
    L’éternelle comparaison entre des objets de luxe et des objets grand public pour justifier le prix d’un Leica…
    Pour que les choses soient claires, j’ai eu 3 Leica : M6, R7 et R8 + dos numérique.
    J’ai eu beaucoup de plaisir à utiliser le M6, surtout avec un 35 ainsi que le 90 Apo pour les portraits.
    Mais l’image de la 911 et de la Clio n’est pas juste. Il faudrait comparer 2 objets de grande qualité dont les prix sont différents. Par exemple un Leica SL et un Sony A7RII. Ou même une Nissan GT-R et une 911 si vous voulez rester dans l’image automobile.
    Pour ce qui est des objectifs, certes ils fonctionnent toujours. Mais c’est le cas de beaucoup d’objectifs de marques concurrentes dont la monture reste compatible. Zeiss est un très bon comparateur de Leica en la matière.
    Ce que je veux dire, c’est que Leica jouit d’une aura que peuvent avoir certaines marques telles que Porsche ou Harley-Davidson, ou Vuiton, ou certains vins, qui va au-delà de l’analyse objective. Le prix renforce même l’image qu’il nous renvoie de nous-mêmes. Ce que l’on appel “le charme”.
    C’est le principe de l’amour que d’être aveugle ! Et c’est une très bonne chose à la fois pour ces marques et pour leurs acheteurs.
    Mais cela n’a rien à voir avec l’analyse objective d’un rapport qualité prix, voire de l’analyse qualité car les défauts semblent ne plus exister quand on aime, au point qu’ils deviennent pour certains (et pour un temps) des qualités !
    Un Q à 4000€ ne fait pas de meilleurs photos qu’un X100T, au risque de faire hurler. Et je mets au défit quiconque de reconnaitre à l’aveugle les clichés de l’un et de l’autre. Pourtant le Fuji coûte presque 4 fois moins. On pourrait faire la même comparaison avec le M240 et le Xpro2. Ou avec le 90 Apo que j’ai pu avoir sur mon M et le 90 (équivalent 135) du Fuji. A chaque fois, on est dans une gamme de prix qui va de 1 à 4 (4 x 1700€ -prix du xpro2- = 6800€ -prix du M-).
    C’est la raison pour laquelle je peux comprendre l’attachement presque religieux des possesseurs de Leica à leur boitier, mais pour ce qui me concerne je préfère me tourner vers des marques qui m’en donnent au moins autant si ce n’est plus pour bien moins cher. Et avec la différence entre le Xpro2 et son 16mm (équivalent 24) et le M240 + 24mm, je m’équipe de tous les objectifs dont j’ai besoin et je me paye de beaux voyages pour rapporter de merveilleuses images…
    Je parle du X100T et du Xpro2 parce que ce sont, à mes yeux, les meilleurs comparateurs des Q et M, même si Sony a des choses à faire valoir également (je suis actuellement équipé en Reflex Sony FF + Zeiss…).

    1. Merci pour ce long et intéressant commentaire Chorus. Alors déjà, je tiens à préciser que mon boitier “pro” (celui que j’utilise pour travailler) est un Sony A7. Le tout premier. J’ai eu un Fuji X100 (qui m’a à l’époque redonné goût à la photo !), un X-E1, et je garde précieusement mon Fuji X20. Pour en revenir au Sony, équipé de son 55mm 1.8 (le meilleur 50mm du monde d’après DxO, avec le Otus) c’est un combo quasi imbattable pour les portraits. Tout ça pour dire que je comprends ce que vous voulez dire par rapport au prix et à la qualité de Fuji ou encore de la famille des A7.
      Concernant le Leica Q, nous l’avons fait tester à plusieurs personnes, d’âge et d’horizons différents, photographe ou pas. Tous ont adoré la rapidité, la simplicité, et plus que tout, le rendu des couleurs, le “pop 3D” du 28mm. Je leur mets dans les mains un RX1RII, ils ne sauront même pas comment l’utiliser (les boutons, les fonctions multiples dans tous les sens). Quasiment tous ont dit que le prix était trop élevé pour eux mais, que s’ils avaient les moyens, ils se l’achèteraient sans hésiter. Le rapport de 1 à 4, on l’a quand on va chez H&M puis chez Lacoste. Des comparaisons comme celle-ci on en remplirait des pages. Concernant les objos, les Leica sont increvables. D’où leur prix (ultra prohibitif pour certains, c’est sûr).
      N’oublions pas que Leica fait figure d’artisan dans le monde la photo : 2000 employés, contre 26000 chez Nikon par exemple. Beaucoup de ces employés chez Leica travaillant à la main sur certaines parties des appareils, comme on assemble à la main en haute horlogerie ou à l’intérieur des voitures de luxe (à l’intérieur d’une 911, ce n’est pas pareil qu’à l’intérieur d’une Nissan GT-R. Ok la GT-R procure son lot de sensations, j’ai testé !). Cela impacte le prix. Heureusement en tout cas que Fuji, Olympus (OM-D EM10 mark II, une tuerie) et les autres sont là, pour qu’il y en ait pour tous les goûts… et toutes les bourses.

  2. Bonsoir,

    La fabrication main a un prix.
    Je me demande seulement s’il est justifié de ce seul fait ; si le “fait main” rend le produit nécessairement meilleur que le “fait avec des machines de haute précision”. Car au final, c’est bien la qualité produite qui est en discussion.

    Le prix des objectifs Leica se justifie de moins en moins à mes yeux, mais je respecte tout à fait que l’on puisse leur trouver toutes les qualités du monde.

    Seulement un Q ultra moderne (dont la valeur vaut bien celle d’un Sony RII, soit environ 2000€) + Sumilux 28mm de haute volée, le tout à 4000€ d’un côté, et de l’autre un Sumilux 28mm seul, de la même marque, à 5700€… sans jamais avoir été très bon en maths, je cherche l’erreur.

    Cela ne remet pas en cause le plaisir que j’aurais certainement à utiliser un Q. Mais un (futur) x200 Fuji avec son viseur hybride et son écran orientable, son capteur et son processeur, qui ne devrait pas dépasser 1200€ peuvent me donner autant de plaisir à photographier.

    Je reconnais à Leica 1000 qualités. Mais je lui connais aussi certains défauts bien entendu. La longévité de ses produits est aujourd’hui pour beaucoup interrogée par l’obsolescence des outils numériques. Regardons la décote du M monochrome 1ère génération vs l’actuelle…

    Et je sais également que la qualité a un prix.
    Reste à savoir lequel.
    C’est là toute la question.

    Merci en tout cas pour cet échange. Car c’est être d’un avis différent qui rend le débat d’idées intéressant.

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